Enquête Pisa 2006

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La France a réalisé un score de 495 (moyenne OCDE = 500) à la troisième enquête PISA portant principalement sur les connaissances et démarches scientifiques des élèves de 15 ans (niveau Seconde +/-). Nous nous classons à la 17ème place des pays de l'OCDE, ce qui est bien ennuyeux... Un tableau général de la situation est donné dans le rapport préliminaire (tableau 2.13, p 62, les numéros de page cités dans le texte ci-dessous renvoient aux pages pdf et non à la numérotation bizarre du texte original). L'OCDE profite de cette occasion pour faire des suhggestions d'amélioration :

"Accessoirement" étaient testés la compréhension de texte (résultats guère plus brillants venant corroborer le résultat d'une étude PIRLS portant sur les élèves de CM1) ainsi que les capacités mathématiques en termes de démarche : dans ce domaine on est dans la lignée de PISA 2003 qui avait montré la grande difficulté des élèves français du point de vue autonomie et initiative (rapport préliminaire p 144).
C'est d'ailleurs peut-être-là que les résultats peuvent progresser le plus vite, les modifications proposées actuellement (épreuve pratique au bac, nouvelle organisation de l'enseignement des Sciences en Collège, peut-être Option Sciences si elle se développe) doivent permettre une remontée rapide dans le classement si ces réformes sont poursuivies et évaluées régulièrement. Il est clair que ce n'est pas un but en soi de remonter dans les classements, d'autant plus que lesdits classements demandent à être analysés finement, mais les indicateurs montrent tous un état de fait : le nombre d'élèves faibles ou très faibles est beaucoup trop important.
Dans Pisa les élèves sont classés en 6 catégories, les catégories "faibles", - de 1, 1 et 2, représentent près de la moitié des élèves, ce qui est beaucoup trop important (rapport préliminaire fig 6.18 et 6.19, p 152) ; citons d'ailleurs le rapport :
"L'importance grandissante du rôle des sciences, des mathématiques et des technologies dans la vie moderne impose à tous les adultes, et pas seulement à ceux qui aspirent à une carrière scientifique, de posséder une « culture » mathématique, scientifique et technologique pour pouvoir s'épanouir, travailler et participer pleinement à la vie de la société. Le niveau de compétence des « meilleurs » élèves d'un pays en mathématiques et dans les matières connexes peut influer sur la place que ce pays occupera demain dans le secteur des technologies de pointe, en particulier, et sur sa compétitivité internationale, en général.
À l'inverse, des déficiences en mathématiques chez les élèves plus faibles peuvent avoir un impact négatif sur leurs perspectives professionnelles et financières et les empêcher de participer pleinement à la vie de la société.
Il est normal dans ce contexte de voir les décideurs et les enseignants accorder autant de prix à l'apprentissage des mathématiques. L'excellence est de rigueur dans les systèmes d'éducation pour faire face à la demande accrue de compétences en mathématiques. À la lumière de ce qui précède, il est capital de savoir dans quelle mesure les pays réussissent à inculquer ces compétences fondamentales aux jeunes adultes.
Comme le révèle l'analyse exposée dans ce chapitre, les écarts de performance en mathématiques sont marqués entre les élèves de la plupart des pays. Ce constat indique que l'objectif de l'excellence est loin d'être atteint et que les pays doivent prendre en charge un très large éventail d'élèves, y compris ceux dont le niveau de compétence est exceptionnellement élevé ou extrêmement faible. Par contre, cette analyse montre aussi que de grandes disparités de performance ne sont pas nécessairement le lot des pays qui atteignent un score moyen élevé : plusieurs des pays en tête du classement affichent des écarts modérés de score entre les élèves plus « forts » et plus « faibles ».
La variation des performances en mathématiques observée lors du cycle PISA 2006 correspond-elle à une répartition innée des capacités des élèves ? Si tel est le cas, elle constitue un défi pour les systèmes d'éducation et ne saurait être directement influencée par la politique de l'éducation. L'analyse présentée dans ce chapitre montre non seulement que l'ampleur des écarts de performance au sein même des pays varie fortement d'un pays à l'autre, mais aussi qu'un score moyen élevé ne va pas nécessairement de pair avec de grandes disparités. Ce qui précède confirme que l'action publique peut contribuer largement à améliorer l'égalité des chances dans l'éducation et à uniformiser davantage le rendement de l'apprentissage, même si des facteurs contextuels plus généraux doivent effectivement être pris en considération lors de la comparaison de l'ampleur de ces disparités entre les pays. Les pays se distinguent non seulement par leurs scores moyens, mais aussi par l'efficacité avec laquelle ils réussissent à réduire les écarts entre élèves plus « forts » et plus « faibles » et à lever les barrières qui font obstacle à un rendement uniforme de l'apprentissage. Ce constat essentiel a un intérêt direct pour les décideurs politiques."

Un des éléments intéressants de l'enquête 2003, et de nouveau cette fois, était la possibilité de croiser les résultats des élèves avec un certain nombre de variables socio-économiques. Déjà en 2003 la France s'était signalée par une absence totale de résultats diffusés sur un certain nombre d'items (non publication de ces résultats par la France, données tableaux 4.1a et suivants, p 98) : rebelote en 2006... Les données socio-économiques manquantes interdisent de se faire une idée précise des comportements collectifs et individuels. Les seuls résultats publiés concernent les immigrés et les enfants d'immigrés (première ou deuxième génération), ce qui est tout à fait insuffisant évidemment ! (données p 110, tableau 4.2.a et suivants) : les résultats dans ce domaine sont d'ailleurs particulièrement dramatiques (presque 100 points d'écart avec la Finlande, 40 points avec la Suisse).

Pour conclure je reprends ce que dit B. Hugonnier dans sa présentation de PISA 2006 : "Aujourd'hui deux réflexions de fond sont à mener de front pour que les performances s'améliorent et que l'éducation publique ne soit pas mise en doute en France. La première devrait déboucher sur une meilleure utilisation des fonds publics en matière d'éducation. Les redoublements coûtent très chers, les programmes sont trop lourds et beaucoup trop pesants, les horaires sont plus élevés que la moyenne. Il y a là des possibilités de redistribution qui devraient permettre de mieux traiter les élèves en difficulté, sans augmenter la dépense éducative et sans réduire les performances des bons élèves.
La deuxième concerne les modes d'apprentissage et la définition des compétences à acquérir par les élèves. On est toujours sous l'emprise des programmes et des accumulations de connaissances que chaque discipline juge nécessaire à chaque niveau. Il faut se libérer de cette emprise et de cet enfermement, changer les modes d'évaluation, privilégier l'approche par projets interdisciplinaires. De tels changements ne s'effectueront pas immédiatement et il est raisonnable de prévoir un plan sur 10 ans avant d'en mesurer des effets significatifs. De plus ils sont impossibles à réaliser sans mener également en parallèle une réforme profonde des contenus de formation professionnelle des enseignants. Le renouvellement en cours du corps enseignant est une opportunité qu'il ne faut pas manquer."

Espérons que tout ceci ne tombera pas dans l'oubli...

 

L'officiel

Note de la DEPP (06/02/2008)

L'analyse (succinte) de la Direction des Etudes du MEN (06/12/07)

Intervention de X. Darcos (12/12/07)

Sur ce site canadien tous les renseignements utiles...

Quelques articles et réactions 

Un texte d'A. Giordan sur l'enseignement des sciences (mais les maths doivent se sentir concernées...), 12/12/07

A. Bodin sur l'évaluation 12/12/07

J. P. Bourguignon 12/12/07

Les Echos 05/12/07 +
4657228.htm, 4657038.htm

Libération 05/12/07

Le Monde 04/12/07

Philippe Meirieu

Les documents

Sur le site de l'OCDE la page en français
la page en anglais (plus complète)

Si vous avez du mal à charger le rapport préliminaire 2006, les données

Le dossier du café pédagogique

Un rapport d'analyse de l'OCDE très intéressant, résumé

Même si ça ne concerne pas directement Pisa : rapport sur la série S de l'IG ainsi qu'un article de la revue de l'IG (10/07) sur le bac et l'ens. sup.

Un exposé très intéressant de la situation au Luxembourg qui semble avoir des problèmes assez semblables aux notres. Voir aussi le rapport luxembourgeois.
Le système finlandais vu par un principal de collège.

 

 

Quelques interventions


Pierre Léna (astrophysicien) : Il est possible de faire aimer la science à des élèves de 15 ans. Les conditions sont entre les mains des politiques, des scientifiques et des professeurs. Il faut que dans toutes les écoles primaires, à l'âge d'or de la curiosité chez l'enfant, les enseignants, accompagnés, mettent en ouvre des classes dans le style de La main à la pâte, où les enfants font de la science et apprennent avec elle à lire et à écrire, puisque science et langage ont partie liée. Que les sceptiques visitent ces classes, y compris dans les quartiers difficiles, et ils seront convaincus.
Au collège, nous devons aider les adolescents, en respectant la diversité de leurs intelligences et le jeu de leur imagination, à faire de la science autant qu'à en apprendre, à comprendre son unité par-delà les rigides découpages disciplinaires, et à choisir leur métier, où science et technologie vont souvent de pair, sans être "orientés" par l'échec scolaire.
Faire aimer la science est possible à condition de former autrement nos professeurs, dont la moitié sera remplacée en dix ans. Cela est dans la main des universités et des écoles d'ingénieurs, mais des entreprises aussi, qui créent la science et la technique. Qu'elles prennent le défi au sérieux, et dans vingt ans la France aura changé ses scores dans PISA !
Les pouvoirs publics doivent remettre en place un prérecrutement d'enseignants dès la licence, ouvrant le métier à des jeunes brillants mais craignant le coût élevé de longues études. On doit se soucier, enfin, du développement des professeurs tout au long de leur carrière, en maintenant leurs liens avec la science vivante.

Edouard Brézin (physicien) : Plusieurs éléments structurels connus contribuent aux difficultés de notre enseignement scientifique. La grande majorité des professeurs des écoles est issue de filières où il n'y a aucun enseignement des sciences de la nature.
Le collège a plus de difficultés que le primaire à rénover ses enseignements de sciences : dans beaucoup de pays, il n'existe à cet âge qu'un enseignement unique de sciences qui permet de mettre en place observation et interrogation sans se limiter a priori à un cadre disciplinaire préétabli.
En France, celui-ci est partagé entre physique-chimie, sciences de la vie et de la Terre, technologie, dans une logique disciplinaire sans nécessité à cet âge, et il est difficile d'installer un enseignement qui fasse place à l'observation. Il vaut mieux ne pas traiter un sujet de science chez les jeunes enfants que d'imposer une "vérité" sans faire précéder son énoncé d'un véritable questionnement permettant in fine d'en comprendre les raisons.
J'aimerais également que les enseignants de collège disposent de l'aide nécessaire pour faire des expériences, des leçons de choses sur le terrain. Je crains enfin un abus de l'usage des ordinateurs qui donnent instantanément une réponse conduisant à affranchir l'enfant d'une véritable démarche d'investigation.
J'ai visité dans un pays étranger un internat en sciences pour adolescents de très bon niveau où Internet n'était autorisé qu'au plus une heure par jour.
Prolonger la réussite de La main à la pâte dans l'enseignement primaire au collège et au lycée me semble la seule issue.

Jean-Pierre Bourguignon (mathématicien) : Les performances d'une classe d'âge sont une information intéressante, mais ce n'est pas la seule qui mérite d'être relevée. Par exemple, les résultats remarquables que la Finlande aligne dans ces enquêtes sont fondés sur le choix délibéré de centrer les efforts du système éducatif sur l'assurance de ne laisser personne sur le chemin, dans le cadre d'une société très homogène.
Il y a un prix à payer pour obtenir cela, comme nous l'ont montré nos collègues finlandais : une diminution considérable des ambitions de l'école. Le système scolaire français ne réussit pas à monter tout le monde à un niveau convenable. De plus, la société française est bien loin d'être homogène.
Cela est d'autant plus inquiétant que la société technicienne dans laquelle nous vivons a besoin de citoyens ayant des repères clairs et un esprit critique développé. Des efforts considérables doivent être faits.
Cela ne suffira pourtant pas. Si l'on "oublie" ceux qui ont décroché, les performances des élèves français, en mathématiques notamment, sont au contraire assez remarquables. Il est donc important d'examiner si cette situation a évolué ou non.
Vu la désaffection des étudiants vers les études scientifiques, phénomène qui, lui, concerne les lycéens plutôt performants, on peut le craindre. D'autant qu'une diminution des heures d'enseignement scientifique est en place depuis ces dernières années.
Le pourcentage de réussite au baccalauréat ne peut tenir lieu de seule mesure de la performance d'une génération. Il est indispensable de savoir quel contenu est couvert.

Les liens...

Enquête PISA 2006

Enquête PISA 2003


Sur le site de l'OCDE la page en français
la page en anglais (plus complète)

Si vous avez du mal à charger le rapport préliminaire 2006, les données

Le dossier du café pédagogique

Un exposé très intéressant de la situation au Luxembourg qui semble avoir des problèmes assez semblables aux notres. Voir aussi le rapport luxembourgeois.
Le système finlandais vu par un principal de collège.
 

L'enquête Pisa 2003 vue par le Nouvel Observateur

L'enquête PISA 2003 dans son ensemble sur le site de l'OCDE

Sur le site du MEN, avec les exercices à télécharger

Tableaux PISA 2003 http://www.oecd.org/dataoecd/15/47/34011082.xls

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